INFLUENCER
« Cool » est le qualificatif le plus souvent accolé à Apple. D’ailleurs la marque à la pomme cultive cet état d’esprit d’entreprise californienne à la pointe d’un mode de vie à l’américaine, partie intégrante de l’American Way of Life.
Et plusieurs classements confirment cette domination. En effet, Apple est la marque la plus valorisée au monde selon le classement Brand Finance Global 500 pour 2024, devant Microsoft, Google et Amazon. À titre de comparaison, la première marque française, LVMH, ne se hisse qu’à la 52e place…
Mais la force d’Apple est de rester à la tête de ce groupe des marques les plus valorisées, Apple étant première depuis trois années consécutives dans ce même classement.
Le cabinet de conseil Interbrand confirme la domination d’Apple en mettant la marque à la première place de son classement depuis 10 années consécutives.
Cette prédominance s’explique par plusieurs facteurs : un design et des interfaces soignés, un service client efficace, des boutiques reprenant les codes du luxe, et surtout une communication à la pointe.
L’histoire d’Apple est marquée par des campagnes de pub impactantes. La première, autour du thème de 1984, le romain de George Orwell, dépeint un monde où IBM domine le monde et l’informatique personnelle et Apple de prend le rôle de challenger. Le spot, réalisé par Ridley Scott, a été diffusé la première fois lors du Super Bowl le 22 janvier 1984 devant 90 millions de téléspectateurs et est devenu une référence toujours étudiée dans les écoles de communication.
La seconde correspond au retour de Steve Jobs aux manettes d’Apple avec la campagne Think Different. Des affiches en noir et blanc reprenant des photographies de « génies » tels que Albert Einstein, Mohamed Ali ou encore John Lennon avec uniquement le logo d’Apple en petit dans un coin, et en bas l’inscription « Penser différent ». Avec ce slogan, la marque vise à priori une niche, un segment de créatifs. Mais en réalité, la cible est le grand public voulant quelque chose de différent, d’où le slogan ne reprenant pas « Penser différemment », mais bien « Penser différent ».
La troisième suit le début de l’iPod, le baladeur numérique d’Apple qui va révolutionner le positionnement de la marque. L’entreprise californienne ne fait plus uniquement des ordinateurs, mais saute à pieds joints dans l’univers de la musique. Et la communication tranche avec des affiches et des spots publicitaires avec des silhouettes noires, des fonds de couleurs flashy, et seulement l’iPod blanc stylisé et les écouteurs devenus iconiques. Encore une fois, le simple logo permet de savoir qu’il s’agit d’une pub Apple. Mais l’essentiel est ailleurs, les écouteurs blancs vont devenir un signe distinctif avec un accroche simple « 1000 chansons dans votre poche ».
Apple n’a pas besoin de mettre son logo ou son nom en gros sur ses produits ou ses pubs, elle ne met pas en avant les performances de ses machines à l’inverse de ses concurrents. Et pourtant, tout le monde sait quand il voit une pub Apple.
Apple a notamment dépensé en 2022 un budget marketing de 4,7 milliards de dollars. À titre de comparaison, le principal concurrent, le groupe coréen Samsung a dépensé quant à lui 2,57 milliards de dollars en pub… uniquement pour les États-Unis.
Mais à côté de cette communication traditionnelle autour d’affiches et spots de pub, Apple est la reine de l’influence.
Parler d’influence pour une marque peut sembler étonnant. Mais si l’influence correspond à la capacité à changer le comportement d’un tiers, alors l’entreprise américaine a su changer de dimension.
Car autour d’Apple s’est développé un véritable « culte de marque » porté par des aficionados souvent appelé « Fan Boys » ou « applemaniaques ». Ce réseau d’ambassadeurs informels, savamment entretenu par l’entreprise californienne, donne ainsi un effet démultiplicateur à la communication de la marque.
Apple et les Youtubeurs : une histoire d’amour
À côté de cette communication classique, Apple a su s’entourer de quelques relais de communication de la génération Y, les Youtubeurs.
Il existe ainsi un écosystème de blogs spécialisés et de chaines YouTube sur l’actualité et de test des nouveaux produits « pommés ».
On peut ainsi citer MacRumors, Apple Insider, AppleTrack, Cult of Mac, ou encore Mac4Ever et MacGeneration en français pour les publications en ligne
Sur YouTube, la créatrice de contenus iJustine (dont le pseudo reprend les « i » caractéristiques des iPhone, iMac ou encore iPad), compte 7,09 millions d’abonnés. Son interview de Tim Cook, PDG d’Apple en juin 2024 a totalisé plus de 217 000 vues.
Un autre Youtubeur de référence de l’univers tech, Marques Brownlee, de la chaîne MKBHD (19,3 millions d’abonnés) a également interviewé le patron d’Apple en juin 2024. Résultat : 3 millions de vues. Ce même Youtubeur a publié en mai 2024 une vidéo sur le centre de test d’Apple concernant les iPhone. Il y montre les coulisses des tests de résistance à l’eau, à la poussière ou encore aux chocs et aux vibrations. Un sujet qui pourrait paraitre anecdotique ou rébarbatif compte tenu du sujet pour le moins technique. Cette vidéo a pourtant été vue 3,3 millions de fois.
Cette communauté est souvent consciente d’être des fans de la marque à la pomme et ne manque jamais une occasion de chanter les louanges d’Apple. Ils deviennent donc un relai gratuit pour la marque afin de faire sa promotion.
À titre d’exemple, Apple envoie des unités de test de ses nouveaux produits quelques jours avant leur commercialisation à quelques Youtubeurs triés sur le volet. Les tests vidéo disposent ainsi d’un embargo, à savoir une date et une heure avant laquelle les vidéos ne peuvent être postées sur les réseaux sociaux.
L’objectif étant de multiplier l’effet de vague, tous les tests sortant au même moment dans le monde entier et donnant par la même occasion une visibilité maximale à Apple grâce aux algorithmes de partage des plateformes en ligne.
Le lancement de l’Apple Vision Pro, le casque de réalité virtuelle d’Apple sorti en février 2024 aux États-Unis est ainsi un cas d’école. Marques Brownlee a reçu une version de test quelques jours avant le lancement officiel du casque :
- La vidéo du déballage du casque a réalisé 8,7 millions de vues… uniquement pour l’ouverture de la boite et la présentation de son contenu !
- Le test lui-même publié quelques jours plus tard a été vu 26 millions de fois…
La question est donc : combien aurait couté une telle couverture dans des médias traditionnels ?
D’autant que ces contenus vidéos, souvent viraux, se retrouvent sur d’autres plateformes en versions condensées : TikTok, Snapchat ou encore Instagram. La cible est touchée : les jeunes et les créatifs qui deviennent à leur tour les prescripteurs auprès du grand public.
Ces Youtubeurs affirment ne jamais avoir été payés par Apple. Mais ils en retirent un bénéfice indirect : leur chaine étant monétisée par la plateforme YouTube, plus leurs contenus sont vus et partagés, plus ils gagnent de revenus publicitaires.
L’équation est donc assez simple : avoir un produit Apple en avant-première est l’assurance d’attirer du trafic sur leurs chaines YouTube.
Et pour obtenir ces produits en exclusivité, il leur faut être la meilleure vitrine possible pour qu’Apple les sélectionne dans ce petit club de privilégiés… quitte à être moins « critique » sur les produits de l’entreprise californienne.
La relation est donc « gagnant-gagnant » pour la marque et les créateurs de contenus.
Ces Youtubeurs stars sont, chance ultime, invités au siège social d’Apple lors des « keynotes ». Derrière ce terme barbare se cache le plus gros rouleau compresseur médiatique existant. En effet, Apple a pour habitude de garder le secret le plus absolu avant toute présentation produit.
L’art du lancement : l’écho médiatique gratuit
Tout lancement fait l’objet d’une présentation appelée Keynote (le nom du logiciel concurrent de PowerPoint développé par Apple).
Ces keynotes visent à présenter les caractéristiques du nouveau produit, ses fonctionnalités ainsi que son positionnement tarifaire. Et le tout est préparé comme un film hollywoodien. Et le spectacle est saisissant. Il suffit de regarder le lancement du premier modèle d’iPhone par Steve Jobs en 2007 pour entendre la foule hurler à la présentation de chaque nouvelle fonction. La présentation est construite pour faire monter la tension : quel nom, quel design, quelle interface et enfin quels usages. Tout semble simple, le public est ravi et le buzz est fait.
Cette recette était déjà présente lors de la première présentation du Macintosh en 1984 et demeure encore comme la marque de fabrique d’un lancement réussi.
Cet art du lancement de produits a une traduction simple : une machine à générer de la publicité gratuite.
Selon David Yoffie, professeur à la Harvard Business School, Apple aurait ainsi généré 400 millions de dollars de couverture médiatique gratuite en quelques semaines suite au lancement du premier iPhone en 2007[i].
Et cet esprit de communauté à un effet bénéfique à long terme : la loyauté[ii].
Les chiffres récoltés par WorldMetrics pour 2023 sont sans appel :
- 90 % des utilisateurs d’iPhone disent qu’ils sont susceptibles d’acheter un autre appareil Apple.
- 87 % des clients Apple disent préférer les produits Apple aux autres marques technologiques.
- 84 % des clients d’Apple disent faire confiance à la marque pour fournir des produits de haute qualité.
- 81 % des clients Apple ressentent un sentiment de fierté et de prestige en possédant des produits Apple.
Les clients Apple deviennent donc « captifs » et sont plus susceptibles de faire eux-mêmes la promotion de la marque à leurs proches.
La marque à la pomme sait attirer à elle la bienveillance de publications spécialisées permettant de générer en retour une couverture médiatique gratuite et largement impactante. Mais Apple sait également retourner une situation de communication négative pour en faire un atout d’influence.
Apple contre Greenpeace ou l’art du retournement
Les entreprises sont de plus en plus souvent l’objet de campagnes de dénigrement ou même de boycott de la part de groupes de pression plus ou moins indépendants.
Cette situation, Apple en a été la cible de la part de Greenpeace, l’ONG environnementaliste la plus importante et sûrement la plus connue au monde.
Cherchant son nouveau relai de communication, le groupe non gouvernemental international de protection de l’environnement fondé en 1971 au Canada décide de porter son attention sur le secteur des nouvelles technologies.
En août 2006[iii], Greenpeace publie son Guide to Greener Electronics, un classement des groupes électroniques selon un certain nombre de critères dont l’utilisation de produits toxiques et leur recyclage. Apple obtient une note de 2,7 sur 10 et l’une des dernières places du classement alors que ses concurrents, Dell et Nokia, se voient attribuer un honorable 7 sur 10. Greenpeace en profite alors pour lancer une campagne de communication nommée « Toxic Tech » dans laquelle elle égratigne largement la marque à la pomme.
Cette opération vise à faire pression sur Apple afin qu’elle s’engage sur l’arrêt de l’utilisation de certaines substances de la liste OSPAR+ issue de la Convention d’Oslo-Paris qui vise à prévenir et à éliminer la pollution marine.
Greenpeace met en avant qu’en ciblant Apple, et plus largement le secteur des nouvelles technologies, l’ONG s’attaque au marché de la gestion des déchets électroniques, les grands groupes produisant des équipements qui, une fois en fin de vie, se voyaient envoyer dans des pays peu regardants au niveau des règlementations environnementales pour finir dans des décharges à ciel ouvert.
La campagne de pression s’intensifie alors pour Apple suite à la communication Toxic Tech lorsque Greenpeace lance une pétition en ligne à l’automne 2006 rassemblant des milliers de signatures.
La tension est alors maximale pour la firme de Cupertino sous les feux des projecteurs, mais cette fois-ci loin de son image d’entreprise « cool » et « innovante ». Elle se voit reléguée au rang de mauvais élève dont les produits polluent. La pomme est toxique.
La stratégie la plus simple aurait été de dénigrer le classement de Greenpeace, de questionner les critères choisis ou encore les motivations derrière la campagne de l’ONG.
Mais la réponse d’Apple va aller totalement à l’encontre de cela, surprenant même l’ONG qui s’attendait peut-être à une confrontation plus directe.
En effet, le 4 avril 2007, Steve Jobs publie une lettre ouverte sur le site de l’entreprise : « A Greener Apple », une pomme plus verte[iv].
Sur la base d’un audit interne de ses pratiques de recyclage et de fabrication, le PDG d’Apple souligne les efforts déjà réalisés par l’entreprise pour éliminer certaines substances toxiques et améliorer les programmes de recyclage. En outre, Jobs annonce publiquement le projet d’Apple d’éliminer progressivement les retardateurs de flamme bromés (BFR) et le chlorure de polyvinyle (PVC) de ses produits d’ici 2008, un délai plus ambitieux que celui d’autres fabricants d’électronique, dont Dell.
Sans admettre l’impact de la campagne de Greenpeace, Steve Jobs met en avant l’attachement d’Apple à l’environnement, en prenant au passage appui sur le culte de la confidentialité de la marque pour expliquer son manque de communication.
À partir de cette date, Apple s’engage à publier un rapport annuel sur sa politique de gestion des déchets toxiques et l’évaluation de ses objectifs de recyclage.
Et cette contre-communication fonctionne. En juillet 2007, soit seulement trois mois après sa lettre ouverte, Apple se voit attribuer une note de 5,3 sur 10 dans le guide de Greenpeace, voyant sa note quasiment doubler par rapport au premier classement une année plus tôt.
La réussite de cette démarche de transparence aurait pu rester temporaire, l’orage concernant Apple étant pour le plus gros dissipé. Mais la marque y a vu au contraire une opportunité de se démarquer de ses concurrents.
Au fil des années, Apple a annoncé une série de mesures visant à éliminer complètement des substances toxiques, puis à privilégier des matériaux recyclés tels que l’aluminium pour la conception de ses ordinateurs portables ou de bureau. Une fois cette étape franchie, Apple a annoncé une nouvelle série d’initiatives pour réduire son empreinte carbone, notamment en utilisant 100 % d’énergies renouvelables pour son siège social à Cupertino ainsi que dans ses centres de données particulièrement énergivores.
Le nouveau siège social de la marque américaine, l’Apple Park à Cupertino, dévoilé en 2011 et devenu opérationnel en 2017, dispose à titre d’exemple d’une production de 17 mégawatts par des panneaux solaires intégrés dans sa toiture.
Une fois tous ses objectifs fixés remplis, Apple a pourtant continué à développer sa politique environnementale. Son dernier plan, Apple 2030, prévoit une neutralité carbone pour toutes ses opérations, y compris celles de ses propres fournisseurs, et l’arrêt de tout minage de terres rares. Sur le dernier point, le plan prévoit que le recyclage des produits à la pomme sera suffisant pour ne plus avoir à extraire de nouveaux minerais tels que cobalt, le tungstène ou l’or. Le programme a notamment permis le développement d’un robot, Daisy, chargé de démonter 200 iPhone par heure pour en extraire les matériaux.
Par ce programme en plusieurs étapes depuis 2007, Apple est passé du bonnet d’âne à leader du secteur tech en matière de protection de l’environnement. Ces efforts ont, comble de la reconnaissance, été salués par Greenpeace elle-même, l’ONG déclarant Apple comme société la plus écoresponsable du secteur des technologies pour l’année 2022.
Tel un judoka utilisant la force de son adversaire pour le faire chuter, Apple a su pivoter dans ses pratiques, notamment de communication, pour faire tomber ses concurrents qui n’ont pas su, ou pu, se mettre au diapason.
« Antennagate » ou l’art de la communication de crise
La communication de crise peut se révéler être un exercice périlleux, et c’est sans doute la raison pour laquelle il s’agit d’une matière particulière au sein de la sphère de l’influence et donc de l’intelligence économique.
Pour Nido Qubein, homme d’affaires libanais américain et président de l’Université High Point « La communication efficace est la clé pour surmonter toute crise ».
Les entreprises ne peuvent que très rarement voir se profiler une crise. Elles vont chercher à les anticiper par une veille efficace, en captant des « signaux faibles ». Mais elles sont souvent emportées par l’imprévu, l’inédit, le non planifié.
Une communication de crise devient alors nécessaire, afin de mitiger les retombées négatives.
C’est à l’occasion d’une crise qu’Apple a pu réellement mettre en avant ses capacités de communications et son savoir-faire en matière d’influence.
Peu de temps après le lancement de l’iPhone 4 le 24 juin 2010, certains utilisateurs se plaignent en ligne de problèmes de réception sur leur smartphone, indiquant voir une baisse de la puissance du signal lorsqu’ils touchent le bord inférieur gauche du téléphone, indiqué par les fameuses barres de réception.
Ces utilisateurs indiquent que cela génère des coupures d’appels dans certaines zones où la réception du signal est plus faible. La crise se voit même dénommée « Antennagate », en référence à « antenna » (antenne en anglais) et le « gate » des tous les grands scandales depuis le Watergate ayant entrainé la chute de l’ancien président Nixon…
Antennagate, tout un programme pour ce nouveau téléphone, d’un design jamais vu auparavant, qui disposait d’une première dans son genre : les antennes étaient intégrées directement dans le châssis métallique extérieur du téléphone.
Apple publie une première communication conseillant de ne pas tenir son téléphone par le coin inférieur gauche lors d’un appel, endroit où se trouvait l’une des antennes de l’iPhone 4. Steve Jobs lui-même interpelé par un acheteur sur Twitter de répondre par une phrase laconique : « You’re holding it wrong », vous tenez le téléphone de manière incorrecte… une gageure pour une entreprise à la pointe de la technologie.
Mais ce communiqué déchaine un tôlé en ligne. Le 2 juillet 2010, plusieurs possesseurs de l’iPhone 4 indiquent vouloir poursuivre Apple, pour fraude par dissimulation, négligence, fausse déclaration intentionnelle et conception défectueuse.
Une action collective (class action) est lancée par un cabinet d’avocats qui publie un site internet pour recueillir les avis des acheteurs insatisfaits.
La crise n’est plus seulement communicationnelle, le risque devient judiciaire. La réponse d’Apple va par conséquent évoluer : le même jour, la firme de Cupertino précise avoir réalisé des tests en laboratoire et identifié un bug devant être corrigé dans une prochaine mise à jour du logiciel interne de l’iPhone.
Mais Consumer Reports, équivalent aux États-Unis de 60 Millions de Consommateurs, une publication avec un poids particulièrement important auprès des américains, indique rejeter cette explication.
Et là, silence radio. Apple va mettre à profit l’une des bases de la communication de crise : rester calme.
La marque ne va pas communiquer de manière anarchique. La société a indiqué travailler sur un correctif pour régler le problème et se tient à cette stratégique de communication.
Pendant le même temps, l’iPhone 4 reste en vente, et la tempête commence à passer.
Mais en coulisse, la pomme s’active. Dans la biographie officielle de Steve Jobs rédigée par Walter Isaacson, le journaliste indique que le PDG d’Apple, alors en vacances au Japon, décide de rentrer précipitamment face à l’alerte soulevée par son équipe de relations presse.
Une réunion de crise est menée, encore une fois dans le plus grand des secrets, avec l’état-major d’Apple. Objectif : mettre en place une stratégie pour reprendre la main et clôturer la crise.
Première étape, désigner un seul communicant. Naturellement celui qui a la confiance du grand public, Steve Jobs lui-même, est le seul à pouvoir tenir ce rôle. Le fondateur d’Apple est connu, il fait même parfois l’objet d’un culte de la personnalité du fait de son statut de génie de l’électronique. Apple c’est lui, et quand il parle, Apple s’engage.
Deuxième étape, enquêter. La cause du bug a été assez vite identifiée, mais il faut pouvoir s’assurer qu’une autre cause sous-jacente n’existe pas. Les labos secrets d’Apple vont tourner sans discontinuer…
Troisième étape, dévoiler sa communication. Apple est connue pour ses keynotes, de grandes conférences lors desquelles elle dévoile ses nouveaux produits. La communication de crise aura le droit à cette grande messe compte tenu des enjeux. La presse est conviée à un événement spécial le 16 juillet 2010.
Quatrième étape, savoir coopérer avec les journalistes. Or comme nous l’avons vu précédemment, s’il y a bien un domaine de l’influence qu’Apple maitrise à la perfection, c’est justement sa capacité à s’attirer les bonnes grâces de journalistes spécialisés et de Youtubeurs déjà conquis par la marque à la pomme.
Cinquième étape, faire preuve de transparence. Lors de cet événement, Apple va d’abord réaliser une conférence de presse assez classique en revenant sur les faits incriminés puis en renforçant sa communication d’origine. Un bug a été détecté lors de tests qui montrent un signal de puissance inexact (les barres de réception) sur les appareils tenus par le coin inférieur gauche.
Mais la société américaine va aller plus loin en comparant son iPhone 4 à ses principaux concurrents. Résultat, dans une vidéo comparative projetée pendant cette conférence de presse, les modèles des concurrents voient aussi leurs barres de réception chuter en fonction de la manière dont les appareils sont tenus en main. Le problème n’est pas propre à Apple, mais les concurrents eux n’ont jamais connu de bad buzz pour autant…
Enfin, Apple va convier certains médias triés sur le volet à une surprise inédite dans l’histoire de la marque : la visite de l’un de ses laboratoires secrets. Les journalistes se voient ouvrir les portes du centre de conception d’antennes des iPhone. Les reporteurs peuvent, entrapercevoir l’envers du décor. Comme à Disneyland, tout est contrôlé, mais le scoop est tellement alléchant.
Les journalistes conviés voient le degré de précision des tests réalisés sur des équipements ultra performants. Dans Wired, une publication tech de référence, le journaliste indique faire partie des 10 heureux participants à ce tour organisé et en profite pour publier quelques clichés souvenir, dont les photographies d’une impressionnante chambre anéchoïque, un équipement de pointe[v].
Apple, pour clôturer sa communication, indique publier sa mise à jour permettant de résoudre le problème d’affichage des barres de réception. Et la marque va plus loin en proposant à ses clients non satisfaits de pouvoir être remboursés de leur achat s’ils le souhaitent ou alors de se voir envoyer, gratuitement, une coque de protection pour leur iPhone permettant de ne pas toucher directement l’antenne et donc de limiter les problèmes liés à l’indication du signal de puissance.
La presse spécialisée se fait l’écho en masse de cette communication, et le pari est gagné. La crise s’estompe.
Une mauvaise gestion peut faire perdurer ou même amplifier une crise. On se souvient de l’effet Streisand[vi], du nom de la chanteuse américaine qui, voulant faire interdire la publication de photos en 2003 de sa maison afin de protéger sa tranquillité, avait au contraire donné un éclairage encore plus important sur ces clichés en lançant une procédure judiciaire largement couverte dans la presse, une sorte d’effet boomerang de communication involontaire.
A contrario, la gestion de la crise de l’Antennagate par Apple a eu un résultat bien meilleur dans la mesure ou l’iPhone 4 s’est écoulé à 50 millions d’unités et est demeuré pendant plusieurs années l’un des smartphones les plus vendus au monde. [vii]
Le philosophe grec Héraclite ne s’était pas trompé : « La crise est la mère de l’opportunité ».
Que ce soit la communication « positive » à travers des influenceurs acquis à sa marque, ou une communication « défensive » face à Greenpeace ou de l’Antennagate, Apple sait mener une stratégie d’influence efficace. Mais quand cette stratégie communicationnelle ne fonctionne plus, l’entreprise californienne peut aussi mettre en place une approche plus « offensive » grâce à l’arme du droit.
Apple et la guerre du droit
« Je détruirai Android, parce que c’est un produit volé. Je mènerai une guerre thermonucléaire ».
Steve Jobs, co-fondateur d’Apple
On reprend souvent l’image du soft power, souvent traduit en français comme étant la capacité de convaincre. Cette doctrine théorisée par le professeur américain Joseph Nye a été utilisée par la sphère des relations internationales pour expliquer le pouvoir d’un État de peser sur les acteurs internationaux de manière non violente, c’est-à-dire sans recours au conflit armé.
La puissance américaine a notamment été analysée sous ce prisme pour montrer la prédominance de l’Oncle Sam après la chute du Mur de Berlin à travers sa prédominance culturelle, notamment via le secteur du divertissement. Mickey Mouse et Coca-Cola devenant ainsi les meilleurs ambassadeurs de l’hyperpuissance US.
Il est d’ailleurs saisissant de voir qu’Apple a elle-même participé à ce soft power en devenant la marque numéro un au niveau mondial du secteur électronique, les écouteurs blancs des iPods étant érigés en signe distinctif de l’American Way of Life…
Cependant, le soft power n’est qu’un côté d’une pièce qui comporte également une dimension beaucoup plus sombre, incarnée par le hard power.
Là où le soft power est « cool », le hard power ne fait que reprendre le concept de puissance traditionnelle de contrainte, en particulier grâce à l’outil militaire.
Reprenant cette même trame, nous avons vu précédemment qu’Apple dispose d’un fort pouvoir d’influence, notamment à travers un corps de fans acquis à la marque, mais également à des actions plus ciblées de lobbying.
Mais Apple sait aussi se positionner sur le plan plus offensif en utilisant un outil pour parvenir à ses fins, la guerre du droit.
Le « lawfare », parfois francisé en usage stratégique du droit, vise à l’utilisation d’un système judiciaire pour combattre un ennemi. Bien que pouvant apparaitre anodin, utiliser le droit pour régler un différend, le lawfare cherche au contraire à créer un déséquilibre au profit de la partie à l’initiative de l’action.
Loin d’être anecdotique, la guerre du droit fait des victimes. Le meilleur exemple, et le plus marquant, reste l’affaire Alstom qui a vu, en France, notre fleuron national être vendu à la découpe à des intérêts américains dans un contexte de pressions judiciaires. Notre entreprise était en effet sous la menace d’une procédure de la part des autorités anticorruption américaines au titre du FCPA (Foreign Corrupt Practices Act), une règlementation extraterritoriale adoptée par le législateur américain en 1977 et ayant une visée internationale.
L’objet n’est pas ici de retracer la débâcle de l’affaire Alstom, notamment sous son angle industriel ou politique. Mais il apparait nécessaire de saisir l’importance du droit comme menace et outil de pression.
Apple pour sa part est régulièrement l’objet de plaintes de consommateurs ou de poursuites par des patents trolls, des « chasseurs de brevets », une expression désignant une personne ou une société qui, détenant un brevet, mais ne l’utilisant pas de manière industrielle, intente des procédures contentieuses afin d’obtenir des droits de licences et des royalties. Ces « personnes morales sans activité » (Non Practicing Entity – NPE) vont dans certains cas racheter des lots de brevets d’entreprises en difficulté ou en liquidation et dont les brevets constituent souvent le seul actif, dans le seul but de pouvoir par la suite poursuivre de grandes entreprises afin d’obtenir un pourcentage des ventes ou une rente afin de ne pas bloquer leurs produits.
Ce procédé, souvent comparé à du chantage, est le lot des grandes entreprises et tout particulièrement dans le secteur des nouvelles technologies ou les inventions brevetées peuvent parfois empiéter sur des brevets concurrents.
Si Apple est souvent la victime de ces procédures, la marque à la pomme a également compris l’importance de l’arme juridique comme outil de protection et surtout de contrainte envers ses concurrents.
Plus particulièrement, une procédure a jeté une lumière crue sur cette pratique visant à limiter les capacités de l’un de ses plus sérieux concurrents, Samsung. Le groupe coréen est en effet apparu comme la cible de la plus grosse procédure judiciaire intentée par Apple au cours de son histoire, et de manière indirect Google et son système d’exploitation Android.
Apple avait déjà poursuivi dans un passé plus lointain Microsoft pour avoir copié ses innovations. La firme de Cupertino avait déposé une plainte en mars 1988 contre la firme de Redmond au motif que l’environnement bureautique Windows reprenait les éléments du logiciel d’exploitation des ordinateurs « pommés ». Mais Apple, au bord de la faillite dans les années 1990, avait finalement soldé ce différend à l’amiable, le retour de Steve Jobs aux commandes ayant permis de signer un accord avec le rival de toujours, Bill Gates, contre un gros chèque.
Loin de vouloir chercher in fine un accord avec son nouveau rival Samsung, Apple cherchait cette fois-ci une victoire incontestable face au constructeur de téléphones coréen et son partenaire Google avec son système Android. Plus besoin d’argent pour sauver l’entreprise, la firme de Cupertino voulait surtout un KO financier et moral face à l’intolérable : le vol de ses innovations liées à son produit le plus révolutionnaire, l’iPhone.
Car ce procès n’était en réalité qu’une partie de billard à plusieurs bandes. L’objectif affiché d’Apple était de voir les smartphones Samsung interdits à la vente au niveau international au motif de la violation de nombreux brevets portant sur le design, les éléments d’interface ou encore de certaines fonctionnalités et donc, par ricochet atteindre le système Android de Google. À titre d’exemple, Apple a fait valoir la propriété d’un brevet portant sur la fonction « glisser pour déverrouiller » utilisée dans les premiers smartphones avant l’ajout de capteurs d’empreintes digitales ou de reconnaissance faciale.
Pourtant la relation entre Apple et Samsung apparaissait jusqu’alors assez symbiotique, dans la mesure où le conglomérat coréen était le principal fournisseur de composants de l’iPhone : écrans, batteries, ou encore puces mémoires provenaient des usines du pays du matin calme.
Apple voulant faire reconnaitre son rôle d’inventeur du smartphone moderne ne pouvait pas se voir copier toutes ses innovations à bas frais par son concurrent-fournisseur.
Début 2011, l’entreprise californienne se lança donc dans cette bataille judiciaire en déposant deux plaintes auprès de la Cour de District de Californie du Nord. Dans une plainte en réponse, Samsung dénonça pour sa part le vol de certains de ses propres brevets par la firme américaine.
Mais la guerre juridique n’en était qu’à ses prémices. Fin 2011, Apple et Samsung avaient déposé une vingtaine de procédures dans 10 pays différents. L’année suivante, on comptabilisait une cinquantaine de litiges dans le monde entier entre les deux parties, représentant plusieurs milliards de dollars de demandes de dédommagements respectifs.
En août 2012, le jury de la Cour de District de Californie du Nord rendit un verdict largement favorable à Apple et en octroyant un dédommagement de 1,049 milliard de dollars. Avec l’appui de ce premier jugement, Apple déposa une requête afin d’obtenir l’interdiction de vente de certains des appareils Samsung, ce qui lui fut refusé dans un premier temps avant que la société ne fasse appel et obtienne cette mesure contraignante.
En septembre 2012, Samsung demanda un nouveau procès devant la Cour d’Appel Fédérale des États-Unis qui est compétente en matière de propriété intellectuelle. En mai 2015, la Cour Fédérale confirma une partie de la première décision, mais diminua les montants de dédommagement. En décembre 2016, la Cour Suprême des États-Unis confirma cette décision.
En parallèle, la deuxième plainte initiale d’Apple fit également l’objet de plusieurs décisions judiciaires notamment en mars 2014, mai 2014, février 2016 et enfin novembre 2017, mais pour des montants plus faibles, portant sur des dédommagements d’environ 11,6 millions de dollars en faveur d’Apple.
Ces deux grandes procédures aux États-Unis vont devenir le centre d’une galaxie d’une cinquantaine de litiges dans le monde qui vont, peu à peu se solder.
La saga judiciaire entre Apple et Samsung aura finalement duré sept années, jusqu’à un règlement extrajudiciaire aux États-Unis en 2018[viii].
Cette épopée contentieuse n’aura eu qu’un faible impact financier sur Samsung et son partenaire Google. Mais l’objectif n’était pas là, Apple disposant d’une puissance financière inégalée. En réalité, la cible était l’image de marque du groupe coréen, présenté à longueur d’articles, et au fil des décisions de justice, comme « copieur » ou encore comme « voleur » des innovations du groupe américain.
Depuis 2018, cette image demeure. Il suffit de regarder les comparatifs sur les produits Samsung, leurs design ou fonctionnalités pour voir dans la presse spécialisée des titres reprenant toujours ces qualificatifs peu flatteurs. Un article d’une publication spécialisée publié le 15 septembre 2024 présentant le groupe coréen de « copieur en série »[ix].
La guerre du droit, ou le moyen le plus efficace de faire plier un concurrent !
Le lobbying ou le talon d’Achille d’Apple
Dans le domaine de l’intelligence économique, la question de l’influence est bien souvent réduite à la notion de lobbying.
La Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) définie le « lobbying » ou la « représentation d’intérêts » comme étant une « activité qui consiste à prendre l’initiative d’entrer en contact avec des personnes chargées d’élaborer et de voter les décisions publiques ou de conduire l’action publique nationale ou locale pour influencer leurs décisions »[x].
La question de l’influence, ici d’une entreprise, sur des décideurs politiques et par extension du législateur, est donc fondamentale.
Apple, en tant que multinationale, est un acteur prépondérant de la vie économique, et est par la même un sujet de multiples réglementations.
Récemment, de grandes entreprises du secteur tech sont devenues la cible de différentes autorités aux États-Unis et en Europe visant à limiter leurs poids. Les GAFAM (acronyme désignant Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) ont été poursuivis aux États-Unis par les autorités anti-concurrence afin de limiter les risques de pratiques préjudiciables à des acteurs indépendants.
La Commission européenne a également ciblé ces entreprises, et en particulier Apple, afin de contraindre certaines pratiques commerciales.
L’adage veut que les États-Unis innovent, la Chine copie, et l’Europe…. régule.
Notre incapacité à innover se traduit par une volonté des régulateurs de limiter le poids des géants américains et chinois pour éviter le décrochage de nos champions nationaux, qui font figure de nains au niveau international.
Apple a été pour sa part particulièrement ciblée par les autorités européennes autour de deux règlementations, la loi sur les marchés numériques (DMA) et la loi sur les services numériques (DSA)[xi].
La première vise, d’après la Commission européenne, à garantir des marchés numériques équitables et ouverts. La seconde, pour sa part, cherche à lutter contre les contenus illicites (haineux, pédopornographiques, terroristes…) et aux produits illicites (contrefaits ou dangereux) proposés en ligne.
Malheureusement pour elle, la firme de Cupertino n’a pas su, pour l’heure, lutter contre ces règlementations. En juillet 2024, la Commission européenne a informé Apple de son avis préliminaire selon lequel les règles de la boutique d’applications installée sur tous les iPhone et iPad, l’App Store, sont contraires au règlement sur les marchés numériques (DMA).
L’Union européenne avait notamment menacé Apple de sanctions financières pouvant aller jusqu’à 40 milliards de dollars en cas de non-conformité à la règlementation DMA.
En réaction, Apple a dû modifier certains de ses services et de ses produits, notamment en intégrant un port de recharge USB-C à la place de son connecteur propriétaire historique Lightning. La marque à la pomme a également promis d’ouvrir certaines de ses technologies, notamment la puce NFC, pour que des applications tierces puissent réaliser des paiements sans contact, ou encore ouvrir la possibilité d’installer des applications en dehors de l’App Store, la boutique d’application exclusive.
L’écosystème d’Apple est souvent comparé à un jardin clôturé par ses concurrents et l’Europe cherche, petit à petit, à abattre ces murs.
Si la stratégie semble pour l’instant porter ses fruits, les GAFAM ayant dû se conformer aux réglementations européennes, il n’en demeure pas moins qu’ils continuent d’innover et de s’adapter.
À cet égard, Apple a ainsi augmenté très fortement son budget lobbying.
Selon LobbyControl et Corporate Europe Observatory, les entreprises du secteur des nouvelles technologies ont dépensé près de 113 millions d’euros en lobbying auprès de l’Union européenne en 2022, une augmentation de 20 % par rapport à 2021[xii].
Apple à elle seule a investi 7 millions d’euros en actions de lobbying au niveau européen en 2002, selon l’ONG Corporate Europe Observatory. Le nombre de lobbyistes internes et externes de l’entreprise est aussi en hausse de 65 % depuis 2015.
Si le lobbying constitue pour l’instant le talon d’Achille d’Apple, la société américaine sait apprendre et rebondir. La pomme plie, mais ne rompt pas.
Notes
[i] https://www.bostonglobe.com/business/2015/03/09/apple-king-free-publicity/tGj9aR3WrX4B0iC8wY0MFN/story.html
[ii] https://www.retently.com/blog/apple-nps/
https://wifitalents.com/statistic/apple-customer-loyalty/
https://worldmetrics.org/apple-customer-loyalty-statistics/
[iii] https://nvdatabase.swarthmore.edu/content/greenpeace-pressures-apple-less-toxic-products-2006-2007
[iv] https://www.macworld.com/article/185475/greenapple.html
[v] https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=https%3A%2F%2Fwww.wired.com%2F2010%2F07%2Fapple-antenna-lab%2F#federation=archive.wikiwix.com&tab=url
[vi] https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Streisand
[vii] https://www.voronoiapp.com/technology/The-Best-Selling-Mobile-Phones-of-All-Time-1164
[viii] https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-apres-7-ans-de-proces-apple-et-samsung-trouvent-un-accord-72205.html#:~:text=Depuis%202011%2C%20Apple%20et%20Samsung,de%20guerre%20à%20l’amiable
[ix] https://www.mac4ever.com/iphone/184055-samsung-copieur-en-serie
[x] https://www.hatvp.fr/lobbying/#questions
[xi] https://www.vie-publique.fr/eclairage/284907-dma-le-reglement-sur-les-marches-numeriques-ou-digital-markets-act
[xii] https://fr.euronews.com/my-europe/2023/09/12/lindustrie-technologique-depense-plus-de-100-millions-deuros-par-an-en-lobbying-numerique-#:~:text=Elle%20est%20suivie%20de%20pr%C3%A8s,%C3%A0%207%20millions%20d’euros.
https://www.mac4ever.com/divers/175200-combien-apple-a-t-elle-depense-en-lobbying-en-2022
https://multinationales.org/fr/chiffres/les-depenses-de-lobbying-des-gafam-continuent-a-augmenter
https://siecledigital.fr/2023/01/25/apple-a-fortement-augmente-son-budget-lobbying-en-2022/