Les mesures de coercition économique (appelées « sanctions »), leur usage et leur efficacité

Sep 7, 2023

La multiplication des cas d’application de mesures de coercition économique imposées par des États ou des groupes d’États afin de contraindre un autre État de modifier, ou de renoncer, à sa politique[1], constitue un fait majeur. Si l’on retient naturellement le cas des sanctions prises contre la Russie[2], que ce soit en 2014-2017[3] ou depuis fin février 2022[4], d’autres cas, concernant Cuba, l’Iran, la Corée du Nord, ne sont pas moins important. Cette tendance n’est pas entièrement nouvelle. Dès l’Antiquité et le Moyen-Âge l’usage de l’arme économique était courante, au point qu’elle fut intégrée dans la panoplie des instruments d’un conflit armé. Mais, l’idée que la coercition économique pourrait, à elle seule, produire des résultats politiques suffisants permettant d’éviter de recourir à un conflit armé, constitue une innovation majeure. Elle découle de la Première Guerre Mondiale.

Cette idée s’inscrit dans la lignée de la notion de « guerre économique ». Mais, alors que cette dernière venait complémenter un effort purement « militaire » dans le cadre d’un conflit, la notion actuelle de coercition économique prétend remplacer le conflit armé. Pour tenter de comprendre ces évolutions actuelles, il faut donc reprendre l’histoire des sanctions économiques depuis leur apparition dans les années 1920.

I. La notion de « guerre économique »

La notion de « guerre économique » est polysémique[5]. Sa définition elle-même est problématique car elle rassemble des processus qui relèvent du conflit, autrement dit de la « relation ami/ennemi »[6] et d’autres qui relèvent de la simple compétition[7]. En France, le portail de l’intelligence économique la décrit comme : « un processus et une stratégie décidée par un État dans le cadre de l’affirmation de sa puissance sur la scène internationale. Elle se mène par l’information sur les champs économiques et financiers, technologiques, juridiques, politique et sociétaux »[8]. Delbecque et Harbulot l’associent à la guerre cognitive et à la guerre de l’information, dans une logique relevant de la guerre asymétrique mise au service d’un pouvoir national total[9]. Il est alors clair que cette notion se construit en parallèle avec la notion de stratégie[10], mais aussi de stratégie économique.

Pour autant, le terme a été utilisé à de multiples reprises tant par des historiens que par des spécialistes en science politique[11]. Pour les historiens, elle sera utilisée pour décrire l’enchevêtrement des tensions économiques et militaires[12], mais aussi des mesures relevant typiquement du conflit armé comme les pratique de blocus (qui est généralement considéré comme un acte de guerre[13]) et, dans le langage militaire, d’interdiction de communications[14]. Le résultat du conflit découlant non plus de l’affrontement direct des moyens militaires des deux parties en présence, mais de l’épuisement économique, ou de la famine, induit par le blocus[15]. De ce point de vue, le blocus peut s’apparenter à une forme de « stratégie indirecte » qui vise à faire plier l’adversaire sans engager le gros de ses propres forces. Les conflits, à partir du XIXème siècle donnèrent naissance à différents types de « blocus », de celui imposé par les marines britanniques, françaises et russes contre l’empire ottoman lors de la guerre d’indépendance de la Grèce (qui conduisit à la bataille navale de Navarin en 1826), au blocus de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie lors du Premier conflit mondial, en passant par le blocus exercé par le gouvernement de l’Union contre celui de la Confédération lors de la guerre de Sécession aux Etats-Unis[16]. La guerre et l’économie sont ici factuellement liées. Dans le champ de la science politique, par contre, cette notion est utilisée afin de caractériser de manière plus fine la composante purement économique des guerres, et le rôle de la volonté de contrôle de ressources dans le déclenchement de guerres. On peut cependant remarquer qu’un acte de guerre économique, s’il a vocation à donner un avantage à celui qui le met en œuvre, peut ne pas être nécessairement antithétique à un affaiblissement en retour de celui qui en est à l’origine[17].

On est alors dans le cas particulier où se manifeste un hypothétique « effet boomerang », un phénomène qui a été analysé en particulier au sujet de la première vague de sanctions contre la Russie en 2014-2017[18].

Dès lors, c’est une analyse coût-avantage qui permet de déterminer si l’action est plus favorable à l’un qu’à l’autre. John Maynard Keynes, très impressionné par le coût humain de la Première Guerre Mondiale, mais aussi par l’effet destructeur du blocus naval franco-britannique sur l’Allemagne, défendait quant à lui le potentiel pacificateur des sanctions économiques[19]. Mais, c’est probablement accorder trop de poids à la rationalité économique. Il est donc un fait établi que l’utilisation de cette notion a varié dans le temps. C’est pourquoi nous nous concentrerons ici sur sa forme moderne.

II. Atteindre des objectifs stratégiques sans faire la guerre ?

La notion de « guerre économique » semble bien être apparue officiellement dans le contexte de la Première Guerre Mondiale (1914-1918). Elle est, au départ, intrinsèquement liée à la notion même de guerre.

Le blocus[20] mis en place par les Franco-Britanniques contre l’Allemagne, blocus dont nul ne pouvait ignorer qu’il frapperait durement une économie dépendante de l’importation de certaines matières premières, eut une importance considérable dans les représentations de la guerre économique. Il engendra des contre-mesures dont la réorganisation de l’économie allemande qui se mit ainsi à l’œuvre pratiquement dans les premiers jours du conflit[21]. Dès août 1914, Walther Rathenau (1867-1922), administrateur de la compagnie d’électricité AEG, avait averti l’armée que le pays n’avait pas de programme d’approvisionnement et connaîtrait sous peu un manque de munitions. Le Département des matières premières de guerre (Kriegsrohstoffabteilung ou KRA[22]) fut mis en place quelques jours plus tard. Ce département était dirigé par Rathenau lui-même, et il le dirigea jusqu’en 1915. Ces contre-mesures peuvent d’ailleurs servir d’exemple contemporain. Le KRA rouvrit des usines, et encouragea aussi la substitution de matériaux disponibles pour les matériaux rares. Un exemple en fut l’utilisation du procédé Haber-Bosch pour la production d’ammoniac, lorsque les puissances alliées ont bloqué les importations de salpêtre chilien[23].

Après la Première Guerre mondiale furent codifiées dans le droit international public et dans le cadre de la Société des nations (SDN), des mesures inspirées par celles mises en œuvre par les pays de l’Entente[24]. La Charte de la SDN disposait, dans son article 16, d’un arsenal de mesures de guerre économique visant à rendre impossible la poursuite d’un conflit[25]. De fait, la Société des Nations eut à traiter un certain nombre de conflits interétatiques durant son existence.

Tableau 1

Conflits traités par la SDN (1920-1940)

  1. Conflit suédo-finlandais 1920 (Iles d’Åland)
  2. Conflit polono-lituanien (Vilna, 1920 – 1923)
  3. Conflit italo-grec (Corfou, 1923)
  4. Conflit de Mossoul, 1924 – 1925 (Grande-Bretagne, Turquie)
  5. Conflit gréco-bulgare 1925 (Demir Kapou)
  6. Guerre du Chaco 1928-1938 (Paraguay-Bolivie-Brésil)
  7. Conflit sino-japonais concernant la Mandchourie 1931 – 1932
  8. Conflit de Leticia (Colombie-Pérou) 1933 – 1934
  9. Guerre italo-éthiopienne 1935-1936
  10. Guerre russo- finlandaise, 1939 – 1940

 

Si, parmi ces conflits, la « Guerre du Chaco » fut une occasion de discuter certaines mesures de coercition économique[26], l’article 16 de la charte de la SDN fut réellement testé lors du conflit Italo-Éthiopien de 1935-1936. En effet, après plusieurs années de préparation, l’Italie Mussolinienne décidait le 2 octobre 1935 d’envahir l’Abyssinie, nom sous lequel était connue l’Éthiopie[27]. Le 3 octobre 1935, après le bombardement d’Adigrat et Adoua, l’empereur Haïlé Sélassié (le Négus) saisit promptement le Conseil de la SDN et souligna la « violation de la frontière de l’Empire et la rupture du Pacte par l’agression italienne ». Un comité de coordination, appelé le Comité des 18, fut chargé de l’application des sanctions prévues par l’article 16 de la Société des Nations. Ce comité exclut d’emblée des sanctions militaires et eut beaucoup de mal, du fait de l’obstruction de la France, à définir des sanctions économiques[28]. Ce Comité des 18 annonça des sanctions financières et économiques « relativement bénignes »[29]. Furent interdits la vente à l’Italie de certaines matières dites « stratégiques » comme des minéraux, le caoutchouc ou bien encore les équipements de transports[30]. Le Comité proposa d’aller au-delà et de les étendre à l’acier, au coke au pétrole et au fer. Ici encore, la France – au nom du pacte Laval-Mussolini de 1935 – s’opposa à ces mesures[31]. Elle réussit même, avec l’aide de la Grande-Bretagne, à faire capoter les mesures concernant le pétrole et les produits pétroliers. L’échec des sanctions eut donc des causes multiples[32]. Tout d’abord, comme on l’a dit, la réticence de la France et de la Grande-Bretagne à les appliquer. Ensuite, le fait que nombre de ces mesures n’étaient pas coercitives. Enfin, la SDN n’était pas totalement représentative de la communauté internationale[33]. En effet, le refus des Etats-Unis d’y participer, puis le retrait du Japon, affaiblissaient sa représentativité.

La guerre d’Abyssinie décrédibilisa donc la SDN. Mais, elle ne fut pas le seul exemple de sanctions économiques avant 1945. Les Etats-Unis, non membres de la SDN, cherchèrent à i la suite de l’agression du Japon contre la Chine (1937) d’user de sanctions. Ils décidèrent, en 1938, de suspendre le traité de 1911 qui accordait au Japon la clause de la Nation la plus favorisée et durcirent leur position en 1939 avec le Export Control Act de 1940 qui interdisait l’exportation de matériel aéronautique mais aussi de ferrailles, très utilisée dans l’industrie japonaise. Devant la décision du Japon d’occuper l’Indochine française en 1940, ils décidèrent un gel des avoirs japonais aux Etats-Unis, une mesure qui coupait largement le Japon de tout accès au pétrole et qui conduisit les dirigeants japonais à attaquer les Etats-Unis[34].

Ici encore, on peut parler d’un échec des sanctions économiques, au départ sans doute parce qu’elles étaient trop légères et, par la suite, parce qu’elles devinrent tellement efficaces qu’elles ne laissaient pas d’autre choix au Japon que de capituler politiquement ou d’attaquer les Etats-Unis. De ce point de vue, il est possible que l’on se trouve face à une forme d’« effet boomerang » des sanctions, mais cet effet était cependant pris en compte par le gouvernement des Etats-Unis. L’Export Control Act de 1940 servit cependant après-guerre à la définition de l’Export Control Act de 1949 et à celui de 1951, qui furent la base de la politique de sanctions économiques menée par les Etats-Unis du temps de la Guerre Froide[35].

III. Les sanctions économiques pendant la guerre froide et leurs effets

Après la Seconde Guerre mondiale, la question des sanctions économiques fut ressuscitée mais avec la volonté constante d’éviter les erreurs commises par le SDN. La question de l’application et du respect des sanctions par l’ensemble de la « communauté internationale, fut au centre des réflexions[36]. Un autre point important était évidemment la position dominante des USA. La Charte des Nations Unies, dans son chapitre VII consacré aux « Actions en respect des Menaces pour la Paix, des infractions à la Paix et des Actes d’Agression » reprit la logique de l’article 16 de la SDN[37] avec plusieurs articles qui vont des sanctions économiques (Art. 41) à l’usage de la Force Armée (Art. 42). La Charte mentionne la possibilité que ces mesures puissent avoir un effet négatif, autrement dit un effet boomerang, sur un membre des Nations Unies (art. 50). La notion donc de coercition économique, de mesures s’apparentant à des mesures de guerres économiques[38], figure donc bien dans droit international Cependant, ces mesures sont strictement liées au Conseil de Sécurité (CSNU). On doit signaler que sanctions unilatérales sont en théorie condamnées par les Nations unies ce qui n’a pas empêché leur utilisation[39], notamment par les Etats-Unis.

L’efficacité des sanctions a dépendu de nombreux facteurs. Le principal étant l’écart économique entre le pays (ou le groupe de pays) décidant des sanctions et le pays « cible » doit être pris en compte. Il a été en général supérieur à 10/1 pour le PIB, et parfois bien plus, reflétant la position unique qui était celle des Etats-Unis au sortir de la guerre en 1945. Ceci a néanmoins évolué avec le temps.

Un des cas les plus intéressant fut l’ensemble des sanctions prises contre l’Afrique du Sud du fait de sa politique d’apartheid[40], ainsi que les sanctions prises contre la Rhodésie (aujourd’hui Zimbabwe) en 1966[41]. Les sanctions contre l’Afrique du Sud furent prises tardivement, en dépit d’une condamnation précoce adoptée par l’ONU 1964, à la demande de la Bolivie et de la Norvège car le Conseil de Sécurité considérait que la politique d’apartheid menée par l’Afrique du Sud troublait gravement la paix et la sécurité internationale[42]. Pour le cas de la Rhodésie, après une tentative infructueuse du Royaume-Uni, une résolution déposée par la Bolivie et l’Uruguay fut finalement adoptée (par dix voix et une abstention) qui déclarait que le Conseil de Sécurité : « Constate que la situation résultant de la proclamation de l’indépendance par les autorités illégales de Rhodésie du Sud est extrêmement grave, qu’il convient que le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord y mette fin et que son maintien dans le temps constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales »[43]. Cette condamnation, par contre, entraîna plus rapidement des sanctions et la Grande-Bretagne mit même en œuvre un semi-blocus naval de la Rhodésie pour s’assurer que les sanctions soient réellement appliquées[44].

IV. Quel effet des mesures de coercitions économiques prises par l’ONU et des mesures unilatérales des États-Unis ?

Les différents cas où la communauté internationale décida de mettre en œuvre de coercition économique eurent des résultats pour le moins mitigés.

Tableau 2 Succès et échecs des sanctions économiques internationales

 

Objectif

1945-1969 1970-1989 1990-2000
Succès Échec Succès Échec Succès Échec
Capacité à modifier la politique du pays cible 5 4 7 10 8 7
Changement de régime et démocratisation 7 6 9 22 9 23
Arrêt d’opérations militaires 2 2 0 6 0 3
Modification de la politique militaire (hors conflit) 0 6 4 10 2 4
Autre changement important de politique 2 13 3 4 5 5
 

Total

Tout cas confondus 16 31 23 52 24 42
Cas où les Etats-Unis sont impliqués 14 14 13 41 17 33
Sanction unilatérale prises par les Etats-Unis 10 6 6 33 2 9
Ratio échec/succès global 1,94 2,26 1,75
Ratio échec/succès par rapport à des conflits ou des politiques militaires 4,00 4,00 3,50
Ratio échec/succès global pour les sanctions unilatérales des Etats-Unis 0,60 5,50 4,50

Source : Hufbauer G.C., Schott J.J., Eliott K.A., Oegg B., Economic sanctions reconsidered , Washington DC, The Peterson Institute For International Economics, 3rd ed., 2007 Table 5.1., p. 127

Ces exemples posent le problème de l’efficacité générale de sanctions économiques, autrement dit leur capacité à conduire le pays cible à modifier substantiellement sa politique et à rechercher un accord avec les pays appliquant ces sanctions, mêmes quand elles sont décidées par les Nations-Unies[45]. Car, les sanctions n’ont pas été appliquées uniquement dans le cadre de l’ONU. Il y a eu aussi des pratiques de sanctions unilatérales, essentiellement de la part des Etats-Unis. Ces pratiques sont réputées « illégales » si l’on suit la charte des Nations-Unies. Mais, reflétant leur rôle de superpuissance politique et militaire dans les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont usé de mesures de coercition économique, autrement dit de sanctions économiques, sur un large éventail d’objectifs. Ils n’ont d’ailleurs pas, il convient de le souligner, utilisé uniquement des sanctions économiques, mais aussi des opérations secrètes et une influence politique générale sur l’élite politique du pays cible[46]. Les sanctions ont ainsi pris une dimension de « guerre économique » globale imposée par les Etats-Unis, et plus généralement par le « monde occidental » [47].

Cela a eu un impact quant à l’évolution dans l’efficacité des sanctions. Ces mesures sont toujours prises pour aboutir à une décision politique de la part du pays qui est visé par ces mesures. On remarquera que les sanctions appliquées pour des raisons « militaires » ont cependant toujours eu peu de succès.

Tableau 3 Succès et échec des sanctions unilatérales américaines

Nombre de cas
1945-1969
Succès 14
Echec 14
1970-1989
Succès 13
Echec 41
1990-2000
Succès 17
Echec 33

Source : Hufbauer G.C., Schott J.J., Eliott K.A., Oegg B., Economic sanctions reconsidered , Washington DC, The Peterson Institute For International Economics, 3rd ed., 2007 Table 5.2., p. 129

Les décideurs américains ont pu atteindre initialement (1945-1969) un niveau de réussite élevé, comme on peut l’observer dans le tableau 3. Mais, au fil des décennies, les changements dans l’économie mondiale ont sapé l’efficacité des sanctions unilatérales.

Immédiatement après la Seconde Guerre mondiale, l’économie américaine était le réservoir financier pour la reconstruction des pays dévastés par la guerre. C’était aussi le principal fournisseur, et parfois le seul fournisseur, de biens et de services essentiels à l’économie mondiale.

Pendant les années 1960, les États-Unis sont restés la principale source d’aide économique pour les pays en développement. Mais, depuis les années 1960, les flux commerciaux et financiers se sont diversifiés, les nouvelles technologies se sont propagées et le budget américain de l’aide étrangère s’est pratiquement tari. La reconstruction en Europe et l’émergence du Japon est venue concurrencer les Etats-Unis, et la croissance économique mondiale a réduit le nombre de pays vulnérables aux sanctions économiques[48]. L’explication la plus évidente et la plus importante du déclin de l’efficacité des sanctions américaines est donc le déclin relatif de la position américaine dans l’économie mondiale[49], mais aussi le phénomène de « démondialisation » s’accompagnant d’une « desoccidentalisation » des échanges économiques[50].

V. Le problème de la cohérence et de la persistance dans l’action

Mais elle n’est pas la seule. Les États-Unis n’ont pas toujours achevé ce qu’ils avaient commencé[51]. Très souvent, les mesures de coercition économique requièrent du temps pour avoir un effet sensible. Mais, plus le temps passe et plus le risque d’un renversement des préférences politiques aux Etats-Unis même existe. En effet, si les sanctions résultent en général d’un consensus dit « bi-partisan », ce dernier est souvent lié à des négociations complexes entre les deux partis, Démocrates et Républicains. Ces négociations, si elles débouchent en général sur un compromis, aboutissent assez rarement à un compromis stable dans la longue durée. L’émergence de nouvelles priorités, ou de nouveaux objectifs politiques, vient perturber le compromis initialement trouvé[52]. Par ailleurs, il peut arriver que ces mesures aient des effets en retour sur l’économie américaine, provoquant des modifications d’opinions dans le corps électoral, modifications qui doivent être prises en compte par l’élite politique. Il y a donc clairement un problème d’incohérence politique.

On notera que ce problème ne se limite pas aux Etats-Unis et qu’il peut aussi se manifester dans le cas de mesures de coercition économiques prises dans le cadre du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Enfin, dans le cas de mesures prises par le CSNU, les évolutions des choix des pays membres permanents du Conseil de Sécurité peut aussi être un facteur d’incohérence ou de manque de persistance si les mesures de coercitions doivent être maintenues sur une assez longue période. Ces problèmes de manque de cohérence ou de manque de persistance sont des problèmes majeurs quand on observe les effets des mesures de coercition économique.

Ensuite, il y a le problème de la faisabilité de la mesure de coercition. Ainsi, dans les cas où l’objectif des sanctions était d’imposer la non-prolifération nucléaire, ou de convaincre un pays de renoncer à son programme nucléaire – comme ce fut le cas avec les mesures visant l’Inde, Pakistan, Libye, Iran et Irak – le refus de livrer du matériel clé était naturellement un élément important de la combinaison de ces politiques. Cependant, étant donné que d’autres fournisseurs de composants sanctionnés sont progressivement apparus, et qu’ils étaient souvent disposés à vendre, mais aussi dans certains cas que les pays visés ont réussi à fabriquer eux-mêmes le matériel nécessaire, l’objectif de non-prolifération s’est révélé progressivement inatteignable. C’est la perte du monopole technologique par les États-Unis, et la diffusion générale de ces technologies ou des capacités technologiques, de par les monde qui a donc affaibli leur pouvoir de sanction. Enfin, alors que les mesures financières faisaient partie du train de sanctions dans plus de 90 % des épisodes antérieurs à 1973, elles n’étaient présentes que dans les deux tiers des cas après cette date. L’éventail des sanctions financières a également changé. Là encore, dans certains cas, d’autres sources d’aide financière étaient disponibles.

Globalement, l’efficacité des sanctions économiques a toujours été médiocre, et elle s’est dégradée dans la période post-1970. Même quand le déséquilibre économique entre le pays décidant d’appliquer des sanctions et le pays cible était considérable, et l’on pense ici aux sanctions unilatérales prises par les États-Unis contre Cuba, elles n’ont pu que très rarement obtenir l’effet désiré[53]. Les débats sur les effets produits par ces sanctions sur le, ou les, pays émetteurs de sanctions se sont par ailleurs multipliés. Ainsi, le Council on Hemispheric Affairs a même soutenu que les sanctions avaient causé plus de tort aux Etats-Unis qu’à Cuba[54].

VI. La question des mesures de coercition économique dans le monde post-guerre froide

Avec la fin de la guerre froide, les Nations Unies ont commencé à imposer des sanctions économiques de manière plus fréquente. Cependant, les contraintes financières et les différences politiques entre ses États membres ont limité le champ d’action du Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU). Celui-ci adopte souvent des sanctions ciblées lorsqu’il est contraint de « faire quelque chose ». Le changement dans l’environnement international, et une définition évolutive et croissante de la paix et de la sécurité collectives, ont conduit le CSNU à imposer beaucoup plus de sanctions au cours des années 1990 qu’au cours des 45 années précédentes[55]. L’émergence de nouveaux conflits et défis, a changé l’orientation des politiques de sanctions mais n’a pas diminué leur utilisation[56].

Il faut cependant noter que la nature de ces sanctions a changé après que les sanctions contre l’Irak et Haïti aient suscité de fortes inquiétudes et protestations concernant les dommages collatéraux imposés aux civils[57]. On est donc ici confronté à un « effet boomerang » en provenance de l’opinion publique, essentiellement dans les pays occidentaux. Les Nations Unies sont passées des embargos complets d’une époque antérieure à des mesures plus limitées telles que les embargos sur les armes, les restrictions de voyage et le gel des avoirs[58]. Les restrictions sur le commerce se sont limitées aux produits de base stratégiques – les exportations lucratives de diamants des régions tenues par les rebelles d’Angola et de Sierra Leone et un embargo pétrolier contre la Sierra Leone pendant une courte période lorsque les rebelles contrôlaient la capitale. Fait intéressant, les pays d’Europe occidentale, qui avaient vigoureusement résisté aux pressions américaines pour imposer des sanctions contre l’Iran, la Libye et Cuba, sont devenus beaucoup plus actifs lorsque des troubles ethniques ont frappé près de chez eux dans les Balkans[59]. Les Nations Unies ont donc imposé des sanctions commerciales et financières globales contre l’Iraq, l’ex-Yougoslavie et Haïti et diverses sanctions ciblées (généralement des embargos sur les armes et des sanctions sur les voyages) contre l’Afghanistan, la Libye, la faction de l’UNITA en Angola, le Rwanda, Libéria, Somalie, Soudan, Éthiopie et Érythrée, Sierra Leone et Côte d’Ivoire.

L’Irak en 1990 fut le cas le plus important d’application de sanctions et aussi le cas le plus médiatisé de l’après-guerre froide. Mais, les sanctions n’ont pas réussi à forcer les troupes irakiennes à quitter le Koweït. Les sanctions ultérieures n’ont pas réussi à débarrasser l’Irak de Saddam Hussein, même si la pression des sanctions a permis de localiser, de détruire et d’empêcher l’acquisition renouvelée d’armes de destruction massive avant l’invasion de l’Irak en 2003. Cela constitue d’ailleurs un intéressant précédent. Les sanctions de l’ONU ont été un succès dans la mesure où l’objectif était d’empêcher l’Irak de se réarmer[60]. Pourtant, elles ont été présentées comme inefficaces par les États-Unis pour justifier leur propre invasion de l’Irak sans aucun mandat de l’ONU.

La prise de conscience des dommages collatéraux, autrement dite de « l’effet boomerang » a également engendré un contrecoup[61]. Le risque d’un « effet boomerang » a commencé à être pris beaucoup plus au sérieux. Ces préoccupations se sont concentrées dans deux domaines : les conséquences humanitaires, comme cela s’est produit dans le cadre des sanctions globales en Irak[62], et les coûts de l’application des sanctions pour les États de première ligne, tels que les voisins balkaniques de l’ex-République du Yougoslavie pendant le conflit bosniaque ou lors de la crise du Kosovo. De plus, l’expérience de l’Irak, de la Yougoslavie, d’Haïti et d’autres a créé une « lassitude des sanctions » chez de nombreux membres de l’ONU et une réticence à imposer de nouvelles sanctions de grande ampleur tant que les questions des dommages collatéraux aux victimes innocentes[63] et aux États de première ligne ne sont pas résolues. Ajoutons que les manipulations liées à la propagande des États-Unis, en particulier lors de l’intervention de l’OTAN au Kosovo et en Serbie[64], voire la désinformation systématique pratiquée par les gouvernements sur ce sujet et dévoilée par des ONG[65], ont pu contribuer à une réticence de plus en plus marquée quant à l’engagement d’États membres de l’ONU dans une logique de sanctions et à douter même de l’impartialité des interventions de l’ONU[66].

Les conséquences des interventions « humanitaires » sur les populations qu’elles sont censées protéger ont été de mieux en mieux établies, comme dans le cas de Haïti[67] ou du Kosovo[68]. Il a été ainsi montré que les effets négatifs d’une intervention, que ce soit ceux des opérations militaires ou des sanctions économiques réputées capables d’éviter une intervention militaire, pouvaient s’avérer du même ordre que les effets négatifs d’une non-intervetion. Cela a aussi contribué à faire monter des interrogations sur la légitimité de telles interventions.

Conclusion

Le bilan de la pratique des sanctions comme arme diplomatique est donc relativement décevant et nettement en retrait par rapport à ce qu’espéraient les fondateurs de la SDN en 1919-1920. Dans l’ensemble, l’efficacité des sanctions a été stable, et faible, au cours du XXe siècle. Ceci peut être attribué à plusieurs facteurs :

  • 1 la volonté politique du pays visé par les sanctions de mettre en œuvre ce qu’il considère comme une politique vitale pour sa survie, et le soutien d’une large part de sa population dont il peut bénéficier.
  • 2 La capacité du pays visé à briser l’isolement, ou les tentatives d’isolement, dont il fait l’objet et à maintenir des flux significatifs de commerce concernant les produits qui sont visés par les sanctions[69].
  • 3 La capacité du pays visé à substituer des produits locaux, de qualité équivalente, aux produits faisant l’objet des sanctions. Cette capacité est d’autant plus grande que la capacité générale de l’économie du pays est importante et que ce pays maintient des liens importants avec le reste du monde[70].

L’expérience américaine de sanctions unilatérales hors du cadre de l’ONU a donné des résultats qui, eux aussi, sont fortement dispersés. Compte tenu de la prééminence tant économique que technologique et politique des Etats-Unis, ces sanctions ont pu avoir une efficacité dans les années 1950 et le début des années 1960. Par la suite, elles se sont avérées bien moins efficaces, voire contre-productives au fur et à mesure que les Etats-Unis perdaient cette prééminence économique et technologique. L’accélération du déclin économique des Etats-Unis, mais aussi des pays « occidentaux », a engendré un pivotement quant à l’efficacité de sanctions « unilatérales » ou prises par un petit nombre de pays. Ceci n’a pourtant pas été perçu dans nombre de pays, tant pour des raisons idéologiques que du fait d’une utilisation souvent « naïve » des statistiques économiques internationales[71].

D’une manière générale, les sanctions ont été très peu efficaces quand il s’est agi de faire cesser des opérations militaires. Ceci avait déjà pu être remarqué dans la période de l’entre-deux guerres, avec les conflits du Chaco ou d’Abyssinie. Le détournement de l’esprit et de la lettre des sanctions par les Etats-Unis dans le cas de Cuba et plus encore dans celui de l’Irak a aussi conduit à une délégitimation massive du principe des sanctions. Cela a conduit nombre de pays à se retirer de la pratique des sanctions et a contribuer à en réduire encore plus l’efficacité.

Un fait doit être ici pris en compte. La prolifération des sanctions économiques au début des années 1990, à la suite de la fin de la Guerre Froide et de la dissolution de l’URSS, a provoqué des réactions négatives considérables, non seulement aux États-Unis mais aussi aux Nations Unies et parmi les partenaires commerciaux des États-Unis. « L’effet boomerang » est devenu de plus en plus visible. Cet effet ne peut aller que s’amplifiant dans la mesure où les sanctions ne sont prises que par un pays, aussi important soit-il ou par un groupe de pays ne représentant pas la communauté internationale.

Jacques Sapir

Directeur d’Études à l’EHESS et enseignant à l’École de Guerre Économique

Directeur du Centre d’Études des Modes d’Industrialisation

Membre étranger de l’Académie des Sciences de Russie

[1] https://www.ohchr.org/en/unilateral-coercive-measures Voir aussi, Olson R.S., “Economic Coercion in World Politics: With a focus on North-South Relations” in World Politics, vol. 31, n°4, July 1979, pp. 471-494.

[2] Carpentier-Charlety E., « Le Mirage des Sanctions » in Fondation Jean Jaurès, March 30, 2022, https://www.jean-jaures.org/publication/le-mirage-des-sanctions-economiques/

[3] Bēlin M. and Hanousek J., “Making sanctions bite: the EU-Russian sanctions of 2014”, April 29th 2019, VoxEU – CEPR, https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/eu-sanctions-against-russia-over-ukraine/ . Voir aussi Van Bergeijk P.A.G., “Russia’s tit for tat”, April 25th, 2014, in VoxEU-CEPR, https://voxeu.org/article/russia-s-tit-tat et Ashford E., “Not-so-Smart Sanctions: The Failure of Western Restrictions Against Russia”, in Foreign Affairs, vol. 95, n°1, January-February 2016, pp. 114-120.

[4] Voir, https://www.consilium.europa.eu/fr/policies/sanctions/restrictive-measures-against-russia-over-ukraine/#economic ainsi que https://www.piie.com/blogs/realtime-economics/russias-war-ukraine-sanctions-timeline et https://finance.ec.europa.eu/eu-and-world/sanctions-restrictive-measures/sanctions-adopted-following-russias-military-aggression-against-ukraine_en

[5] Delbecque E. et Harbulot C., La guerre économique, Paris, ed. « Que sais-je ? », 2011, n° 3899

[6] Schmitt C., La notion de politique (1932), trad. M.-L. Steinhauser, Paris, Calmann-Lévy (Liberté de l’esprit), 1972, p. 66 et Schmitt C., « Éthique de l’État et État pluraliste » (1930), in Parlementarisme et démocratie, trad. J.-L. Schlegel, Paris, Seuil, 1988, p. 143-144.

[7] Daguzan J-F, Lorot P., (dir) Guerre et économie, Paris Ellipses, 2003

[8] https://portail-ie.fr/resource/glossary/95/guerre-economique

[9] Delbecque E. et Harbulot C., La guerre économique, op.cit.

[10] Harbulot C., L’art de la guerre économique : surveiller, analyser, protéger, influencer, Versailles, VA Éditions, 2018.

[11]  Laïdi A., Aux sources de la guerre économique: Fondements historiques et philosophiques, Paris, Armand Colin 2012

[12] Laïdi, A., Histoire mondiale de la guerre économique, Paris, Perrin, 2020. Voir aussi, Crouzet F., La guerre économique franco-anglaise au XVIIIe siècle, Paris, Fayard, 2008.

[13] Oppenheim L., International law : a treatise, Clark, N.J, Lawbook Exchange, 2005 (1re éd. 1920), 799 p., 2 vol, p. 53. D’Amato, Anthony A. 1995. International Law and Political Reality: Collected Papers, p. 138

[14] Appelé « SLOC interdiction », et où SLOC signifie « Sea Lines of Communication”.

[15] On doit noter comme premier cas documenté le blocus naval exercé par Sparte contre Athènes, qui obligea cette dernière à se rendre. Boardman, John & Griffin, Jasper & Murray, Oswyn. 2001. The Oxford History of Greece and the Hellenistic World, p. 166.

[16] Cowley R., et G. Parker. The Reader’s Companion to Military History New York: Houghton Mifflin,1996.

[17] Coulomb F., « Pour une nouvelle conceptualisation de la guerre économique », in Jean- François Daguzan et Pascal Lorot (dir.), Guerre et économie, op.cit.

[18] Bali M., “The Impact of Economic Sanctions on Russia and its Six Greatest European Trade Partners: a Country SVAR Analysis”, in Finansy I Biznes [Finance & Business], Vol. 14 (n°2), 2018, pp.45-67; Bali M. & Rapelanoro N., “How to simulate international economic sanctions: A multipurpose index modelling illustrated with EU sanctions against Russia”, in International Economic, Vol. 168, December 2021, pp. 25-39; Giumelli, F.,– «The Redistributive Impact of Restrictive Measures on EU Members: Winners and Losers from Imposing Sanctions on Russia ». Journal of Common Market Studies, March 2017, pp. 1-19; Kholodilin, K. and Netsunajev, A., « Crimea and Punishment: The Impact of Sanctions on Russian and European Economies ». Deutsches Institut für Wirtschaftsforschung DISCUSSION PAPERS, No. 1569, 2016.

[19] Coulomb F. et Matelly S., « Bien-Fondé et opportunité des sanctions économiques à l’heure de la mondialisation » in Revue Internationale et Stratégique, n° 97, 2015-1, pp. 101 – 110.

[20] Vincent, C. P., The Politics of Hunger. The Allied Blockade of Germany, 1915-1919, Athens, OH, Ohio University Press, 1985 ; Siney, M. C., The Allied Blockade of Germany, 1914-1916, Ann Arbor, MI, The University of Michigan Press, 1957; Farrar, M. M., Conflict and Compromise. The Strategy, Politics and Diplomacy of the French Blockade, 1914-1918, La Haye, Mouton, 1974.

[21] Dallas, G., 1918: War and Peace, Londres, John Murray, 2000.

[22] Williamson, D. G. (1978). « Walter Rathenau and the K.R.A. August 1914-March 1915 » in

 Zeitschrift für Unternehmensgeschichte / Journal of Business History, Vol. 23, 1978, (2), pp. 118–136, (https://www.jstor.org/stable/40694617 ). Voir aussi Sapir J., L’économie mobilisée, Paris, La Découverte, 1990.

[23] Asmuss, B., « Die Kriegsrohstoffabteilung » (https://www.dhm.de/lemo/kapitel/ersterweltkrieg/industrie-und -wirtschaft/kriegsrohstoffabteilung.html ) Deutsches Historisches Museum.

[24] Ferrand B., « Quels fondements juridiques aux embargos et blocus aux confins des XXe et XXIe siècles »,  in Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 214, Presses universitaires de France, 2004, pp. 55-74.

[25] Traité de Versailles – Pacte de la Société des Nations, consultable à l’adresse suivante : https://mjp.univ-perp.fr/traites/sdn1919.htm

[26] Farcau B.W., The Chaco War. Bolivia and Paraguay 1932-1935, Westport Connecticut and London, Praeger, 1996.

[27] Baer, G. W., The Coming of the Italo-Ethiopian War,  Cambridge, MA: Harvard University Press, 1967.

[28] de Juniac G., Le dernier Roi des Rois. L’Éthiopie de Haïlé Sélassié, Paris, L’Harmattan, 1994

[29] Marcus H., A History of Ethiopia, University of California Press, 2002

[30] de Juniac G., Le dernier Roi des Rois. L’Éthiopie de Haïlé Sélassié, op.cit..

[31] Marcus H., A History of Ethiopia, op.cit..

[32] Bonn, M. J., “How Sanctions Failed” in  Foreign Affairs n°15/1937, (January), pp. 350–61.

[33] Northedge F.S., The League of Nations: its life and times, 1920-1946, Leicester, Leicester University Press, 1988,

[34] Worth, Roland H., Jr., No Choice But War: the United States Embargo Against Japan and the Eruption of War in the Pacific, Jefferson, North Carolina: McFarland, 1995..

[35] Silverstone P.H., « The Export Control Act of 1949: Extraterritorial Enforcement“, in University of Pennsylvania Law Review, Vol. 107, n°3, Janvier 1959, pp. 331-362.

[36] Doxey, M.P., Economic Sanctions and International Enforcement, 2d ed. New York: Oxford University Press for Royal Institute of International Affairs, 1980.

[37] https://www.un.org/en/about-us/un-charter/chapter-7

[38] Adler-Karlsson, G., 1968. Western Economic Warfare, 1947–1967: A Case Study in Foreign Economic Policy. Stockholm, Sweden: Almqvist and Wiksell, 1968.

[39] « Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations unies », résolution 2625 (XXV), adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies au cours de sa vingt-cinquième session, le 24 octobre 1970, https://www.un.org/french/documents/ga/res/25/fres25.shtml / https://treaties.un.org/doc/source/docs/A_RES_2625-Eng.pdf

[40] Galtung, J., “On the Effects of International Economic Sanctions: With Examples from the Case of Rhodesia” in World Politics 19 (April), 1967, pp. 378–416.

[41] https://www.lemonde.fr/archives/article/1966/12/07/londres-demande-a-l-o-n-u-de-decreter-des-sanctions-contre-la-rhodesie_2683412_1819218.html

[42] https://www.un.org/securitycouncil/sites/www.un.org.securitycouncil/files/fr/sc/repertoire/64-65/64-65_11.pdf

[43] https://www.un.org/securitycouncil/sites/www.un.org.securitycouncil/files/fr/sc/repertoire/64-65/64-65_11.pdf

[44] Avenel, Jean-David. « Introduction », Guerres mondiales et conflits contemporains, vol. 214, no. 2, 2004, pp. 3-6.

[45] Pape, R.A., “Why Economic Sanctions Do Not Work ?” in International Security Vol. 22, No. 2 (Fall, 1997), pp. 90-136.

[46] Blechman, B. M., and Kaplan S.S., Force Without War: U.S. Armed Forces as a Political Instrument. Washington: Brookings Institution, 1998.

[47] Askari H.G, Forrer J., Teegen H. and Yang J., Economic Sanctions: Examining Their Philosophy and Efficacity, Westport, Praeger, 2003

[48] Hirschman, A. O. National Power and the Structure of Foreign Trade, expanded edition. Berkeley: University of California Press., 1980.

[49] Haas, R. N. Economic Sanctions and American Diplomacy. New York: Council on Foreign Relations, 1998

[50] Sapir J., La Démondialisation, (nouvelle édition augmentée et mise à jour) Paris, Le Seuil, 2021

[51] Hufbauer, G. C., Schott J.J., and Elliott. K.A. Economic Sanctions Reconsidered: History and Current Policy. Washington: Institute for International Economics. 1985

[52] Art, Robert J., “Bureaucratic Politics and American Foreign Policy: A Critique,” in Policy Sciences, n°4 (1973); Perlmutter, Amos, “The Presidential Political Center and Foreign Policy: A Critique of the Revisionist and Bureaucratic-Political Orientations,” in World Politics, Vol. 27 (101971)

[53] Spadoni, P.. Failed sanctions: why the U.S. embargo against Cuba could never work. Gainesville: University Press of Florida, 2010.

[54] Peppet M., “Blockade Harms more US than Cuba”, February 19, 2009, https://web.archive.org/web/20180317022046/https://www.coha.org/blockade-harms-us-more-than-cuba/

[55] Cortright, D, and Lopez G.A., The Sanctions Decade: Assessing UN Strategies in the 1990s. Boulder, CO, Lynne Rienner Publishers, 2000.

[56] Hufbauer, G. C., and Thomas Moll, “Using Sanctions to Fight Terrorism”. In Terrornomics, eds. Sean S. Costigan and David Gold. Burlington, VT: Ashgate., 2007.

[57] Drezner, D. W., The Sanctions Paradox: Economic Statecraft and International Relations, Cambridge Studies in International Relations n°65, Cambridge, Cambridge University Press, 1999.

[58] Elliott, K. A. “Analyzing the Effects of Targeted Sanctions” in Smart Sanctions: Targeting Economic Statecraft, ed. David Cortright and George A. Lopez. Boulder, CO: Rowman & Littlefield Publishers, Inc, 2002.

[59] Hufbauer, G. C., and Oegg B., “The European Union as an Emerging  Sender of Economic Sanctions” in Aussenwirtschaft 58 (Jahrgang, Heft IV). Zurich; Ruegger, 2003, pp. 547–71.

[60] Cortright D., Lopez G.A., “Containing Iraq: Sanctions worked” in Foreign Affairs, July/August 2004.

[61] George A.L., and Simons W.E.. The Limits of Coercive Diplomacy. Boulder, CO: Westview Press. 1994

[62] Arnove, A., Iraq Under Siege: The Deadly Impact of Sanctions and War, Boston, South End Press, 2000.

[63] Pekmez J., The Intervention by the International Community and the Rehabilitation of Kosovo, rapport commandité par le projet « The Rehabilitation of War-Torn Societies » coordonné par le CASIN (Centre for Applied Studies in International Negotiations), Genève, janvier 2001

[64] Note confidentielle du ministère de la Défense allemand, analysée dans Jürgen Elsässer, La RFA dans la guerre du Kosovo, chronique d’une manipulation, Paris, L’Harmattan, 2002, p. 48-51.

[65] Human Rights Watch, Under Orders – War Crimes in Kosovo, Genève, 2001, rapport consultable et téléchargeable sur http://www.hrw.org/reports/2001/Kosovo et Human Rights Watch, Civilian Deaths in the NATO Air Campaign, HRW Reports, vol. 12, n° 1 (D), février 2000, téléchargeable sur http://www.hrw.org/reports/2000/nato

[66] « The UN’s own damning verdict on its created civil defence force is fresh evidence of the failure of Special Representative Bernard Kouchner to establish the rule of law in Kosovo » (John Sweeney et Jens Holsoe, « Revealed : UN-backed unit’s reign of terror », The Guardian, dimanche 12 mars 2000)

[67] Pouligny-Morgant B., «  L’intervention de l’ONU dans l’histoire politique récente d’Haïti : Les effets paradoxaux d’une interaction » in Pouvoirs dans la Caraïbe [En ligne], 10 | 1998, mis en ligne le 09 mars 2011, http://journals.openedition.org/plc/576

[68].« Kosovo sex industry », sur http://www.peacewomen.org/news/Losovo/newsarchives02/kosovose

[69] Voir Sapir J., “Wendet sich der Wirtschaftskrieg gegen Russland gegen seine Initiatoren?” in Stefan Luft, Sandra Kostner (Editors): Ukrainekrieg. Warum Europa eine neue Entspannungspolitik braucht, Frankfurt am Main, 2023, Westend-Verlag

[70] Adewale A.R., « Import substitution industrialisation and economic growth – Evidence from the group of BRICS countries” in Future Business Journal, n°3, 2017, pp. 138-158, p. 142-143. Mukherjee, S., “Revisiting the Debate over Import-substituting versus Export-led Industrialisation” in Trade and Development Review, 5(1), 2012, pp.  64–76. Berezinskaya, O., et Alexey V., Production import- and strategic import substitution mechanism-dependence of the Russian industry in Voprosy Ekonomiki n°1, 2015, pp. 103–15.

[71] Sapir J., « Assessing the Russian and Chinese Economies Geostrategically” in American Affairs, vol. VI, n°4, 2022, pp. 81-86.

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